Danse avec le vent

Un poétique texte de printemps inspirée par nos beaux pins des Landes de Gascogne :

Non, ce n’est pas une plaine.

Ce n’est qu’un champ, immense, paraissant bordé d’une simple haie de pins minuscules, animé d’effluves troublantes et balayé par les souffles du vent qui, propulsés du ciel, viennent renifler le sol et poursuivre les tourbillons.

Inutilement, une vrille d’air se visse à l’infini dans le sable léger et brun des labours printaniers. Elle soulève derrière elle un immense foulard poudreux qui se met en torche, se déploie, vire-volte et s’évanouit.

Il réapparaît à côté, dans les pins, gonflé de son amusement et vient se frotter entre les cimes souples comme une anguille translucide dans les fonds marins herbeux.

La nature attendait.

Dans les chandelles vert-jaune de l’année, les gousses gorgées de semence landaise, acceptent soudain, et de concert, de libérer les nuages de pollen colonisateur.

Alors, toutes les houppes se balancent dans une ondulation synchronisée, presque animale. C’est une anémone forestière. C’est un frisson du derme végétal. C’est la gigue des pins maritimes. Ces plumeaux des marécages, grands dadets au tronc gigantesque, sans pied, aux bras squelettiques, unijambistes cylindriques, usines à papeterie pour ne plus être des outres résineuses, sommités naturelles ayant pour charge l’exclusivité de l’horizon, notoriété verticales contraintes pour leur survie de se figer dans un équilibre de groupe.

Ils sont là, les pins. Par milliers. Ces grands mâts simplement haubanés par les muscles de leurs fibres, hérissons d’aiguilles filtrant l’air maritime. Ils transforment le vent dans leur brosse de térébenthine en un simple courant d’air de sous-bois parfumé et enivrant.

Ils sont là, ces bouchons longitudinaux, unités disciplinées en alignements homogènes, réguliers et monotones, répartis dans des quartiers hiérarchisés par les étages d’ancienneté .

Ils sont là et dansent simplement avec le vent.

Joël CONFOULAN